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Le psychanalyste et le Un

Lacan, Le Séminaire 20: Encore, Chapitre X: Ronds de ficelle: «Ces phrases interrompues […] laissent en suspens je ne sais quelle substance. On perçoit là l’exigence d’une phrase, quelle qu’elle soit, qui soit telle qu’un de ses chaînons, de manquer, libère tous les autres, soit leur retire le Un»[1]

Qu’est-ce que retirer le Un ou que le Un se retire peuvent vouloir dire? De quelle substance s’agit-il?

Dans ces pages, Lacan veut nous faire sentir l’importance du nœud borroméen, soit le fait que les trois ronds représentés par le Un restent ensemble. Voici les phrases interrompues de Schreber qui lui servent à montrer ce qui se passe quand un chaînon se détache.

Un effet de désordre, de dispersion dans la langue laissant le sens en suspens jusqu’à nouvel ordre. Il s’agit parfois des signes infimes, et d’autres fois de grands vides.

Face au phénomène du retrait de l’Un, ce qui m’interroge c’est la place de l’analyste. Comment peut-on faire usage de lui pour rétablir un nouement possible? Est-ce qu’il pourra incarner le Un qu’il faudrait pour renouer un chaînon avec un autre?

L’expression «présence de l’analyste» pour désigner l’un des aspects du transfert[2] nous oriente. Présence pour qu’une jouissance à la dérive puisse se localiser.

Présence pour qu’un lien soit possible, même s’il est le seul. Présence pour qu’on puisse avoir un corps, du moins par moments.

Soyez plus détendus quand vous recevez quelqu’un,[3] indication précieuse de Lacan qui peut servir à lire la position de l’analyste comme un Un souple mais puissant pour conserver ensemble ce qui est le plus convenable pour chacun.

 

(Traduit par Lore Buchner)

[1] Lacan, J., Le Séminaire, livre XX, Encore, Paris, Seuil, 1975, p. 115.

[2] Caroz, G., «Quelques remarques sur la direction de la cure dans la psychose ordinaire», Quarto 94-95, Bruxelles, Janvier 2009, p 59.

[3] Lacan, J., «La troisième», Lettres de l’École freudienne, nº 16, 1975.